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Nala & Axel

17 août 2009

Voyage pour Clon'sil

Voyage pour Clon’sil.

 

Ils s’étaient arrêtés en pleine nuit, lorsque Matthéo et Axel affirmèrent qu’ils étaient trop fatigués pour continuer. Enzo avait jugé les lieux. Inspectant un grand chêne en s’imaginant pouvoir s’abriter en dessous, il finit par céder aux plaintes des deux adolescents et leur demanda d’aller vérifier qu’il n’y avait personne autour. Il s’accroupit ensuite devant le tronc puis déposa en douceur la ‘petite sœur’ endormie. Cette dernière n’avait pas réussi à tenir aussi longtemps qu’eux. Et même si elle ne s’était pas plainte une seule fois, le jeune homme avait bien remarqué qu’elle avait du mal à marcher et qu’elle n’avait vraiment pas l’habitude de tant d’efforts physiques. Ce qui était normal, puisqu’elle ne prenait pas de cours d’escrimes. Il lui avait donc dit de dormir un peu pendant qu’il la transporterait sur son dos, ce qu’il fit. Nala ouvrit les yeux, réveillée par le changement de contact.

- « Rendors-toi, nous nous arrêtons là. Tiens, couvres-toi, il ne fait pas chaud. »

Enzo sortit de son sac une couverture qu’il lança à la jeune fille, puis il en sortit deux autres qu’il déposa à coté d’elle pour les deux garçons.

- « Tu n’en a pas ? » Demanda l’adolescente en se redressant. Elle se frotta les yeux, encore à moitié endormie, puis interrogea le chevalier du regard.

- « Je n’avais pas prévu que Matt’ serait avec nous. » Répondit-il simplement.

- « C’est pas un problème. » Fit la voix d’Axel, revenant avec le blondinet. « Je vais me coller à Nala ! » - Il tourna la tête vers la personne en question, puis lui lança un regard malicieux en ajoutant - « Mes grands et puissants muscles te réchaufferont !

- Si tu veux. » Pouffa la jeune fille en ouvrant le duvet. Enzo approuva et déploya une couverture. Il s’éloigna un peu pour s’assoir dos à un tronc, puis détacha la ceinture de son épée pour la poser devant lui, prêt à la dégainer. Il regarda Matthéo enlever ses chaussures, tandis qu’Axel jouait au vantard en donnant sa veste et sa chemise à Nala en prétextant qu’il n’avait pas froid. En vérité, c’était surtout parce qu’il aimait montrer ses ‘puissants muscles’ aux personnes autour de lui. Il se retourna lorsque son frère ricana.

- « T’es jaloux hein ? » S’exclama-t-il en bombant le torse.

- « Au moins je ne serais pas malade demain. » Répliqua le chevalier avec autant d’ardeur.

- « Allez avoue que j’ai un corps de rêve ! Viens faire un bras de fer !

- Avec toi ? Tu rêves. »

Mais Axel s’approcha à grands pas et se mit à genoux devant son frère, un coude au sol et une main levée vers lui. Enzo poussa un soupir et finit par dégager un bras de la couverture pour se mettre dans la même position. Il prit la main de l’adolescent, puis ils comptèrent jusqu’à trois. Le jeune garçon poussa de toutes ses forces, faisant ressortir les veines de son bras. Il réussit à faire pencher le bras de son frangin, mais ce dernier le redressa aussitôt. Le chevalier esquissait un sourire confiant, il ne semblait pas forcer plus que cela. Axel poussa davantage, jusqu’à devenir rouge.

- « Quoi, c’est tout ce dont tu es capable ? » Le provoqua Enzo.

- « Att.. J’vais te… » Bredouilla le garçon en posant son autre main au sol pour se donner plus de force. Il mourrait d’envie de s’aider de ses deux bras, mais savait pertinemment que c’était de la triche. Finalement, son frère décida d’écourter cette bataille, et Axel vit le dos de sa main plaquée au sol en un rien de temps. Il massa son poignet douloureux et grommela des prétextes à cette défaite.

- « Ouais mais tu t’es échauffé tout à l’heure…

- Au lieu de dire des bêtises, va te coucher. Matt’, tu prends le premier tour. Je pendrais le second et Axel finira. » Ordonna Enzo en se recouvrant à nouveau.

- « Eh pourquoi je prends le dernier ? » Protesta Axel en posant ses deux mains sur ses bras pour se réchauffer. Ce fut Nala qui répondit à sa question, l’attendant toujours dans le duvet.

- « Parce que le second est le plus difficile, alors estimes toi heureux de ne pas avoir ce tour de garde. Allez, viens !

- Retient un peu tes leçons, même Nala qui ne prend pas de cours d’escrime le sait ! » Le réprimanda le chevalier. L’adolescent grommela quelque chose puis il s’allongea à coté de son amie. Cette dernière l’observa un instant.

- « Tu a froid ? » Demanda-t-elle en lui tendant sa veste.

- « Non. » Répondit-il simplement, ce qui provoqua un soupir chez la jeune fille. Il avait la chair de poule ! Mais il ne risquait pas de l’admettre. Nala se rapprocha de lui et se leva pour poser le haut de son corps sur le torse du garçon.

- « Moi j’ai froid. Réchauffe-moi s’il te plaît. » Lui murmura-t-elle. Elle savait qu’en demandant cela, il ne la repousserait pas. Sinon il comprendrait qu’elle s’était mise ainsi pour le réchauffer, lui, qui n’avait jamais froid ! La tête posée dans le creux du cou du garçon, elle ferma les yeux en se laissant bercer par le rythme régulier de son souffle. Il l’entoura de ses bras, et la serra contre lui en veillant à ce que la couverture reste sur elle.

 

Le blondinet vint s’installer à coté d’Enzo pour adopter la même position que lui. Les genoux repliés contre sa poitrine, enveloppé dans son duvet, il lui demanda.

- « Tu ne dors pas ?

- Si si… Au moindre bruit, tu me réveilles.

- D’accord. »

Le jeune Eyen passa une main dans ses cheveux pour dégager les mèches qui retombaient devant ses yeux. Il scruta les horizons et tendit l’oreille pour son premier tour de garde. Il n’était pas tellement fatigué, donc ce serait facile. Il savait que le chevalier était toujours éveillé à coté de lui. Ce dernier gardait les yeux grands ouverts. Il mit du temps avant de laisser enfin Matthéo surveiller seul, pour sombrer dans un cauchemar lui rappelant l’homme qu’il venait de tuer.

 

 

Axel entamait le dernier tour de garde. Il avait remit sa chemise et sa veste, et s’était perché sur une grosse et haute branche d’un arbre pour avoir tout le petit groupe dans son champ de vision. Il jouait avec un bâton trouvé au sol, comme si c’était une épée. Oh comme il regrettait de ne pas en avoir une ! Même en bois, elle lui aurait amplement servi à se défendre. Là, tout ce qu’il possédait étaient ses poings. Contre une lame, cela ne valait pas grand-chose. Lorsque son frère était venu le réveiller, il n’avait pas cessé de râler en pensant que la nuit venait à peine d’être entamée et qu’on lui faisait une mauvaise blague. Et en voyant le visage fatigué d’Enzo, il se leva d’un bond, déjà prêt à entamer son tour de garde. Alors qu’il s’imaginait combattre un membre du clan Firel, un petit bruit le fit sursauter. Il se mit à cheval sur sa branche et brandit son bâton sur la silhouette qui l’approchait… Avant de se rendre compte qu’il s’agissait de Nala qui grimpait à l’arbre. Il n’avait même pas fait attention, au point de ne pas la voir sortir de sa couverture pour se diriger vers son arbre ! Mais elle ne fit aucune réflexion là-dessus, se contentant de s’assoir à coté du futur chevalier.

- « Tu devrais aller te recoucher, et profiter que tu sois une fille !

- Justement, ce n’est pas parce que je suis une fille que je ne peux pas résister à la fatigue. Regardes toi, tes paupières se ferment toutes seules. » Murmura-t-elle.

Axel ne répondit pas, sachant qu’elle avait raison. Mais lorsqu’elle lui proposa de prendre la relève, il refusa catégoriquement. C’était son tour, et il n’était pas question que Nala le remplace à cette corvée ! La demoiselle croisa les jambes au dessus du vide sans éprouver le moindre vertige. Voulant la serrer contre lui, le futur chevalier toucha son épaule de la sienne, mais se redressa en apercevant une grimace sur le visage de son amie. La rouquine tourna la tête vers lui, puis se rendit compte qu’il avait vu la tête qu’elle venait de faire. Elle regarda alors autre part, puis commença à se relever sur la branche pour descendre. Mais Axel l’attrapa au bras et la força à rester assise.

- «  Tu as mal ? » Demanda-t-il sur un ton soucieux.

- «  Non, je n’ai rien. Pourquoi cette question ? »

Bien qu’elle veuille mentir sur sa douleur à l’épaule, elle n’empêcha pas le garçon de tirer légèrement sur le col de sa chemise pour découvrir son épaule nue. Malgré l’obscurité qui régnait, le garçon vit clairement sur la peau de la jeune fille, un énorme bleu regorgeant de sang, qui recouvrait l’épaule de Nala. Le souvenir de la manière dont il l’avait frappé quelques heures plus tôt lui revint en tête. C’était lui, l’auteur de cette blessure, lorsque la rouquine n’était pas dans son état normal.

- « Ne fais pas cette tête, Axel, ce n’est rien.

- Tu rigoles ? Bon sang j’y ai été trop fort, pardonne moi !

- Puisque je te dis que ce n’est rien ! » S’exclama la demoiselle avant de recouvrir à nouveau son épaule du haut de sa robe. Axel baissa la tête comme un enfant honteux, balançant ses jambes dans le vide en réfléchissant. Un lourd silence s’installait entre eux, laissant le soin à la jeune fille de ramener ses pieds sur la branche pour blottir ses genoux contre sa poitrine. Elle sentit la main de son ami lâcher son bras, puis en profita pour entourer ses genoux. Après tout, elle n’avait pas si mal.

Enzo se réveilla en sursaut, une main sur la garde de son épée. Il regardait autour de lui d’une manière effarée, son torse ruisselant de sueur. Ses bras étaient tendus en dessous de lui, soulevant son corps. Il était sur le point de se relever et de se battre, avant de se rendre compte que tout était calme autour de lui. Son cœur battait la chamade, mais il inspira bruyamment plusieurs longues bouffées d’air pour se calmer.

- « Ca ne va pas ? »

Les cheveux en pagaille du jeune adulte se levèrent vers les deux visages tournés vers lui. Il regarda un instant Matthéo en face, puis Nala perchée sur une branche d’un arbre, à quelques mètres de hauteur.

- « Un simple cauchemar.. » Marmonna le chevalier en se mettant à quatre pattes sur son duvet. Il ne savait pas comment il s’était retrouvé torse nu, alors qu’il s’était couché avec une chemise sur le dos pour ne pas avoir froid. Il se massa les yeux pour reprendre calmement ses esprits, et chasser l’image de Richard de sa tête. Les premières nuits d’un nouvel assassin étaient toujours les pires.

- « Où est Axel ? » Demanda-t-il en levant son regard sur Nala. Cette dernière montra du doigt la tête du jeune inconscient endormi sur ses cuisses. La poitrine affalée sur la branche, avec les bras et les jambes qui pendaient de chaque coté dans le vide. La rouquine caressait doucement les cheveux du futur guerrier en même temps qu’elle observait de haut les agissements de Matthéo. Ce dernier s’était levé assez tôt, en pleine forme pour aller vérifier qu’il n’y avait personne dans les parages. Il avait également rangé tous les duvets, sauf celui d’Enzo.

- « Axel ! Bon, je vois qu’on peut lui faire confiance. » Lâcha sévèrement le chevalier d’une voix forte, ce qui eut pour effet de réveiller le garçon en question. La première chose que fit Axel en ouvrant les paupières, fut de s’exclamer :

- « Non je ne dors pas ! Je ne dormais pas ! »

Il battit des bras en sentant le vide sous lui, puis bascula sans le vouloir sur le coté en criant de surprise. Nala se mit aussitôt à cheval sur le bois pour tenter de le rattraper, mais le garçon était suspendu à quelques mètres au dessus du sol, avec pour seul sauveur son réflexe d’avoir agrippé la branche de ses bras. Enzo poussa un juron étouffé, puis vint se placer en dessous de son frère. Il leva un bras et ordonna.

- « Lâches ! »

Confiant, le jeune garçon se laissa tomber et sentit soudainement la pesanteur autour de lui s’affaiblir. Comme s’il devenait subitement léger, il tomba avec beaucoup plus de lenteur que prévu et se rattrapa sans problème sur ses jambes.

- « Euh, merci. » Murmura-t-il à son frangin. Ce dernier avait le don de ralentir ou amortir les chutes, que ce soit les siennes ou celles des autres. Il pouvait ainsi affaiblir la pesanteur autour d’un individu pour lui permettre de tomber beaucoup plus lentement.

- « Tu imagines que nous serions morts, si un danger nous guettait !? » S’écria le chevalier en levant les bras.

- « Nala est restée éveillée, elle surveillait. » Le défendit le blondinet, en lançant un regard inquiet vers son ami. Axel gardait les mains dans le dos, la tête baissée. Il se sentait honteux d’avoir fermé les yeux lors de son tour de garde, mettant ainsi le groupe en danger si la jeune fille qui les accompagnait ne l’avait pas remplacé. Il avait l’impression qu’elle cherchait toujours à lui alléger ses responsabilités, alors que lui était à la recherche de défis difficiles. Mais le plus gênant était cette perte d’estime venant de son frère, à son égard. Il détestait cette désagréable impression d’avoir déçu l’un de ses proches. Enzo préféra néanmoins passer l’éponge, et plia son duvet pour le ranger dans le sac. Il en sortit la sacoche de l’œuf pour libérer de la place et la tendis à Nala. L’adolescente descendit de l’arbre en posant les pieds sur les morceaux d’écorces qui ressortaient, puis elle sauta à terre pour récupérer son objet.

- « Es-tu obligée de garder ça ? » Demanda le chevalier en se redressant.

- « Je ne peux pas l’abandonner, je sais que la créature à l’intérieur est vivante, parfois je la sent bouger… Peut-être même qu’elle sent notre présence, si je la laisse elle se fera dévorer. » Répondit Nala en serrant l’œuf contre elle. Une autre raison animait aussi son désir de garder cette coquille auprès d’elle. Depuis quelques temps, plus précisément depuis qu’elle sentait parfois une créature remuer à l’intérieur, elle avait la sensation d’être étonnement proche de l’œuf. Le devoir de le protéger était plus fort en elle, et elle ne savait dire si c’était quelque chose de magique, ou si c’était chez elle l’instinct maternel qui était s’éveillée plus tôt que prévu.

- « Bon, tant que tu le porte, ça ne me pose pas de problème. En route les jeunes. » Conclut le chevalier en prenant la direction d’un petit chemin de terre, le sac sur son dos.

- « Une fois là bas, qu’est-ce qu’on fera ? » Demanda son frère en prenant la seconde position.

- « On les préviendra… Et on priera pour qu’ils réagissent.

-  Parce que ce n’est pas sûr ?

- Je ne sais pas. La forteresse de Clon’sil est réputée pour sa puissance, mais pas pour ses agissements… Il s’agit du meilleur centre d’entraînement pour guerriers, mais rares sont ceux qui y entrent, Et ceux qui en sortent ne sont pas nombreux non plus. Est-ce qu’ils voudront se déplacer pour sauver les nôtres ? Je l’ignore, mais il leur serait plus logique de rester et d’attendre l’ennemi de pied ferme. Peut-être feront-ils quelque chose avec la lettre de papa… »

Le garçon devint pensif un court instant. Pourquoi la lettre de son père les ferait réagir ? Cette cause devenait de plus en plus perdue à ses yeux, et il commençait à regretter de ne pas avoir fait demi-tour pour tenter de libérer le reste de sa famille, et des autres chevaliers. Savoir son idole entre quatre murs le désespérait. Si même son propre père s’était fait prendre, que pouvait-il faire, lui, l’adolescent de quatorze ans ? Oh mais il n’était pas seul pourtant. Un blondinet plus petit en taille qui pouvait savoir d’un premier coup d’œil si la personne mentait ou non. Il est clair que cela lui serait très efficace durant un combat, de savoir si la personne est honnête ou non. Et Nala était là aussi. Pour risquer de se laisser envahir par une autre personnalité s’il arrivait quelque chose à Axel. Le seul guerrier potable dans le groupe était Enzo. Axel n’avait même pas de don ! Du moins, il ne s’était pas manifesté. Inutile de dire à quel point il n’en était pas fier. Il jalousait presque les dons des autres, mêmes les plus futiles, parce que le sien ne s’était pas manifesté. Cependant, il se demandait parfois si son talent spécial n’avait pas un rapport avec le fait qu’il réussisse à repousser les autres personnalités de Nala ? Mais là, quel rapport y avait-il avec le gêne de sa famille ?

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9 mai 2009

Traîtres parmi les Chevaliers

La nuit était tombée dans la forêt de Sylivia, et le calme régnait en maître dans le groupe restreint qui se protégeait de la fraîcheur du soir dans leur petite cabane. Les trois chaises en bois avaient été sorties avec la vieille table aux pieds inéquitables. La fenêtre était recouverte de carton pour empêcher les brises glacées de pénétrer à l’intérieur, et un bon feu allumé dans la cheminée offrait à la place des ombres mouvantes sous les doux crépitements. Trois rideaux partageaient une moitié de la cabane en trois parties. L’une possédait une couchette où reposait un bâton dessus, et sur le bois étaient accrochées des petites tapisseries bordeaux avec dessus un tigre blanc aux grandes ailes d’ange, claires, et possédant une corne brillante et longue sur la tête. 

 

C’était le symbole des Chevaliers Bordeaux, les chevaliers qui régissaient cette île et qui veillaient à la sécurité des habitants. Leur simple présence intimait le respect et l’admiration. Ils étaient fiers, courageux et avaient la réputation de n’avoir jamais échoué une seule bataille. Satlan Skyan était un chevalier renommé, voire légendaire. Il a commandé des troupes victorieuses devant des combats normalement perdus d’avance. Ce colosse est connu pour sa plus grande bataille, qui fut contre une horde d’Orcs des sables. Ces créatures, à l’apparence humaine mais au gabarit bien plus grand, à la peau sablée, aux petites cornes sur le visage et possédant des crocs sur la mâchoire supérieure, sont les passagères clandestines de l’île. La mer les apporte au large et leur instinct sauvage les pousse à attaquer et tuer les hommes. C’est pourquoi les villes les plus proches de l’océan possèdent des fortifications. C’est également pour cela que les gens sont persuadés qu’il existe une autre terre que la leur dans les eaux. D’autres créatures que les Orcs peuvent représenter un danger pour un voyageur égaré, il y a les Guerritans, créatures à silhouette humaine mais à la tête de chat et à l’esprit très malicieux. Elles sortent la nuit et prennent plaisir à effrayer les gens, ou à les capturer si elles sont de bonne humeur. Plus rare, les Ratseks sont des quadrupèdes à tête de loup, parlant tous les langages. Certains possèdent des ailes noires, d’autres ont des cornes à la place. Malgré leur terrifiante apparence, ils ne sont pas classés dans la catégorie des monstres dangereux car ils ne se nourrissent que de Guerritans et font tout pour ne jamais se montrer aux êtres humains. Ils vivent essentiellement en meute dans les forêts, s’approchant du large seulement pour se nourrir. Personne ne sait comment ils franchissent les remparts sans se faire repérer.

Sylivia était un village non loin de la mer, étant séparé de cette dernière par le grand port de Clon’sil. De grandes murailles étaient érigées, et les rares bateaux qui partaient étaient armés de mercenaires pour défendre le navire. Le poisson pêché ne provenait que des côtes, et les rares animaux marins prit plus loin n’étaient vendus qu’aux familles les plus riches.

 

Assis sur sa couchette, Axel jouait avec son épée de bois tout en s’imaginant combattre avec ardeur des dizaines d’ennemis coriaces, pour finalement leur faire mordre la poussière. Il se voyait brandir l’insigne des Chevaliers Bordeaux, et frimer devant ses amis. Il rêvait à l’admiration qu’il pourrait lire dans les yeux de son père, du légendaire Satlan…

_ « Bon il en met du temps ! » Râla t-il en poussant son rideau pour pénétrer sur la couchette de Nala, cette dernière possédant une fenêtre.

Il déplaça un peu les cartons en évitant de les faire tomber puis regarda à l’extérieur en espérant voir arriver son ami.

_ « Laisse lui le temps. » Répondit la demoiselle qui était en train de faire son lit et qui jeta un regard noir à celui qui venait de le piétiner.

Axel baissa les yeux puis bredouilla un ‘oups’ avant de s’écarter et de retourner sur sa couverture. Il s’assit sur les fesses, les jambes écartées et les genoux repliés. Les coudes appuyés sur les cuisses, il regardait son amie remettre bien ce qu’il avait défait. Puis, voyant qu’elle lui tournait le dos, il se mit à quatre pattes avant de tirer le matelas de la jeune fille.

_ « Axel arrête ! » S’exclama cette dernière en se retournant vivement. Le garçon leva les bras de manière innocente et esquissa un sourire.

La rouquine soupira puis remit son matelas, mais pendant ce temps le garçon s’amusait à voler son oreiller.

_ « Axel ! » Cria t-elle avant d’essayer de récupérer son objet.

En vain, le jeune homme s’était levé et brandissait au dessus de lui le coussin en riant.

_ « Je compte jusqu’à trois. » Fit calmement Nala en croisant les bras.

Elle commença à compter tandis qu’Axel faisait le pitre en lançant l’oreiller dans les airs, touchant à chaque fois le plafond de leur cabane. Lorsqu’elle arriva à trois, elle sauta sur le garçon et le fit basculer en arrière de tout son poids. Surpris, il se rattrapa au rideau et l’arracha avant de tomber sur les fesses, son amie sur les genoux. Cette dernière lui prit le coussin des mains et le plaqua sur le visage du garçon en appuyant. Le futur chevalier se ressaisit bien vite, il attrapa au hasard l’épaule de la jeune fille puis la fit tomber sur le coté avant de se relever pour la plaquer au sol.

_ « Aie, Axel ! »

_ « Oh scuse… »  Bredouilla t-il en s’écartant après avoir écrasé le bras de son amie avec son genoux.

Elle se redressa en affichant une grimace.

_ « Il faut toujours que tu sois brutal ! » S’exclama t-elle en lui tournant le dos, le coussin dans les mains.

C’était une habitude, à chaque fois Axel la taquinait, puis ça finissait en bataille jusqu’à ce qu’il lui fasse mal et elle lui tournait le dos pour se mettre à bouder dans son coin. Et à chaque fois qu’il lui demandait pardon, elle répondait qu’elle ne faisait pas la tête.

_ « Oh j’ai pas fait exprès… Boude pas ! »

_ « Mais je boude pas ! » Répondit-elle en soupirant.

Le jeune garçon se déplaça pour venir se mettre à coté d’elle. Là, il la regarda. Elle ne daigna pas tourner la tête, mais il ne la connaissait que trop bien. Ses yeux étaient remplis d’amour et de joie, ses lèvres tremblaient un peu, elle se retenait de rire. Nala faisait toujours semblant d’être sérieuse, c’est ce qui lui valait une excellente autorité sur Axel. Elle riait rarement aux éclats et gardait trop souvent ses émotions enfermées en elle, au contraire du garçon. Celui-ci fit semblant d’abandonner, puis il leva un bras qui vint se poser sous une aisselle de son amie.

- « T’es chiant ! » Lâcha t-elle en se dégageant, essayant de ne pas le regarder.

- « Gouzi gouzi gouzi ! »

Voyant qu’elle ne réagissait pas, ce qui voulait dire qu’elle ne le repoussait pas, il s’avança davantage et appuya son poids contre son dos pour déposer un baiser dans son cou. La demoiselle frémit et tourna légèrement la tête pour observer son ami du coin de l’œil.

- « Ma Nalala que je n’aaaaaime… » Chantonna-t-il en balançant la jeune fille de gauche à droite. Elle finit par lui accorder un sourire charmant, les yeux pétillants. La belle princesse venait déjà de pardonner au futur chevalier.

Ce dernier avait collé sa tête contre la nuque de la rouquine, le torse plaqué contre son dos et les bras enserrés autour de ceux de son amie. Il fermait les yeux pour profiter de ce câlin qu’il venait de gagner. Au bout d’un moment, il se détacha légèrement et s’assis à coté de Nala. Cette dernière le regarda, puis elle approcha lentement son visage pour embrasser le garçon sur le front, avant de lui accorder un nouveau sourire confiant. Axel en profita pour approcher avec délicatesse ses lèvres de celles de son amie… Lorsque Matthéo débarqua avec un adulte derrière lui. Il avait le visage livide, marqué par l’inquiétude. Sa main tenait fermement la manche de la personne qu’il tirait derrière lui.

- « On a un problème beaucoup plus important venez ! » S’exclama-t-il avant de sortir à nouveau pour regarder les deux autres faire de même.

- « Enzo ? Qu’est-ce que tu fais là ? » Demanda Axel.

- « Venez tous avec moi. » Répondit son grand frère en s’enfonçant dans la forêt. « Nous devons immédiatement fuir, je vous expliquerais en chemin. »

Les trois adolescents le suivirent, et le blondinet raconta alors qu’en allant chercher des vivres, il avait trouvé Enzo sur le chemin, ce dernier ayant un message très important.

- « Papa a été arrêté. » Déclara le jeune homme de 22 ans qui suivait des études de chevalier. Il possédait la même coupe de cheveux courts que son père, mais sa carrure était plus fine que lui. Avec un père aussi honorable que Satlan, il avait réussi facilement à entrer dans l’université de chevalerie, sans même passer par le premier stade qui était de celui d’écuyer. De plus, il s’avérait être un bon élève qui se faisait connaître par sa dextérité au combat plus que par sa force. Il portait une veste de cuir noir et un pantalon de cuir aussi. Son frère devina qu’il y avait une cotte de maille en dessus, ce qui n’était pas vraiment bon signe.

- « Quoi ?? Mais pourquoi ?! »

- « Ne crie pas Axel ! » Le réprimanda aussitôt Enzo. Il ajouta aussitôt en voyant le regard interloqué du garçon. « Un coup d’État. Noriak Firel a pris le pouvoir par la force, et il a monté une armée personnelle qu’il prétend être des chevaliers. Papa s’est opposé à lui, ainsi que tous ceux qui sont loyaux envers le règlement de la chevalerie, et il s’est fait arrêté. » - il marqua une courte pause le temps de s’arrêter pour s’assurer de son chemin, puis de reprendre la marche en virant à gauche - « Ils ont arrêté maman aussi. Et j’ai tout juste eu le temps de m’enfuir. Ils vont s’en prendre à toute notre famille, y compris nos alliés. 

- Mais pourquoi on se bat pas ? Il faut les bouter hors de chez nous ! » S’exclama Axel.

- « Parce que nous ne pouvons pas nous permettre de déclencher une guerre, et je t’ai dit de parler moins fort ! Et puis… Ils sont trop nombreux. Papa m’a demandé d’aller prévenir la forteresse de Clon’sil, d’après lui ils sont tous loyaux et le clan Firel risque d’essayer de les soumettre. »

- « Nous venons avec toi ! »

- « De toute manière, vous n’avez pas le choix. »

Ils continuèrent de marcher parmi les ronces et dans le silence, lorsqu’Enzo déclara sur un ton légèrement méfiant.

- « C’est une chance que vous ayez décidé de désobéir au couvre feu ce soir… »

Il n’y eut aucune réponse, pas un n’osait avouer ce qu’il s’était passé. Ils voulaient faire comme s’il n’y avait rien eu, mais Edmond n’allait pas agir de la même manière. Il allait probablement tout raconter à cousine en premier, puis à ses parents… Et les trois jeunes gens risquaient peut-être d’être poursuivis ! Mais avec un peu de chance, l’ampleur de la situation actuelle allait étouffer leur incident. Nala s’arrêta soudainement, se frappant le front pour se tourner vers la direction inverse.

- « Mon œuf ! » S’écria-t-elle.

- « Je l’ai pris, ne t’en fais pas. » Lui répondit Enzo en lui montrant le sac qu’il avait dans le dos. Il prit ce dernier dans les mains tout en continuant de marcher, l’ouvrit, puis en sortit une sacoche verte qu’il tendit à la demoiselle. Cette dernière le remercia joyeusement et l’ouvrit pour caresser du bout des doigts la coquille blanche qu’il y avait à l’intérieur. Soulagée, elle mit cette sacoche sur son dos et continua comme si de rien n’était. L’œuf était aussi long que son bras. Elle l’avait trouvé il y a deux ans de cela, alors qu’Axel, Matthéo et elle, étaient en quête de découverte sur la plage de Clon’sil, lors d’un voyage de classe. Depuis, elle avait ‘adopté’ cet œuf et chaque soir elle dormait avec, le serrant contre elle pour le réchauffer. Elle souhaitait particulièrement être là lorsqu’il allait éclore, afin d’être la première personne que l’étrange animal qui en sortirait, verrait. Alors que le silence revenait sur la troupe, la jeune fille croisa les bras. Elle lança un regard triste vers le ciel puis s’approcha timidement du chevalier.

- « Que va-t-il leur arriver ? » Demanda-t-elle avec inquiétude.

- «  Ils vont être enfermés, mais ne t’inquiète pas, ils seront vite libérés. » Affirma Enzo sans y croire vraiment. Il sentit le regard de Matthéo peser sur son visage d’un air soucieux, puis lui fit les gros yeux en lui montrant Nala. Il savait que le blondinet lisait la vérité dans les regards, et il ne voulait pas qu’il dise à l’adolescente qu’il venait de lui mentir. Matthéo détourna le regard, se contentant de marcher aux cotés d’Axel.

- « Ta famille va aider la notre, Matt’. Ton oncle nous attend dans la cabane. »

Le jeune homme approuva d’un hochement de tête. Au vu du chemin qu’ils prenaient, il savait qu’il s’agissait de l’oncle Richard. Il était profondément fier de savoir que sa famille était loyale et juste envers le règlement, et qu’elle était une des plus précieuses alliées de la famille Skyan. Ils étaient les yeux du temps, comme disait son propre père. Alors qu’ils ralentissaient l’allure pour prendre un peu de repos avec la sureté qu’ils ne risquaient pas d’être rattrapés, une faible fumée de cheminée s’éleva dans les airs. Une maison de bois se trouvait en plein milieu de la forêt. Son toit était fabriqué en argile, et les rares fenêtres qu’il y avait étaient fermées par des volets. De plus, il y avait une petite grange derrière la maison. La porte était ouverte, et un homme leur faisait signe devant.

- « Venez dans la grange, j’y ai tout préparé ! » S’exclama Richard en voyant la petite troupe arriver à sa hauteur. Il serra la main aux garçons puis fit une petite révérence à Nala, avant de les faire entrer dans la grange. Refermant soigneusement la porte derrière eux en laissant trainer sa main sur la poignée, il finit par s’en écarter et se dirigea vers un ballot de paille. L’homme semblait avoir une cinquantaine d’année. Il était chauve et possédait un petit et étrange regard jaune pâle contrastant avec sa peau légèrement mâte. Une cicatrice de guerre marquait sa joue droite, et une dent en or s’illuminait lorsqu’il souriait. Il était moins grand qu’Enzo, mais avait une carrure plus large que lui.

- « Content de vous voir, mon père a donc réussi à vous prévenir. » Confia Enzo.

- « Il se doutait de ce qui allait arriver, il a donc prit ses précautions. Ton père est un grand homme. Venez, vous devriez vous reposer et dormir ici. » Répondit l’homme âgé de sa voix rocailleuse.

- « N’est-ce pas dangereux ? Je comptais partir ce soir, afin de m’éloigner le plus possible de Sylivia. »

- « Enzo, tu n’y penses pas ? Tu dois te préparer, je vais vous préparer un bon repas et vous préparer un endroit où dormir. Surtout restez là, si quelqu’un vient cachez vous dans la paille ! »

Le jeune chevalier finit par céder, et il regarda l’oncle de Matthéo sortir de la grange pour s’éloigner vers sa maison.

- « Enzo… pourquoi on ne va pas les libérer ? Comme ça on irait tous à la forteresse… » Risqua Axel qui commençait à réellement se rendre compte de la situation.

- « Les libérer comment, par la force de tes petits bras ? Contre toute cette vermine armée postée devant la prison ? Six gardes, rien que pour papa ! Tu te rends compte ? Ils sont venus le chercher à six, tandis que le septième emmenait maman et les deux autres nous cherchaient ! »

Axel se laissa tomber sur la paille. Il voulut regarder par la fenêtre mais grimaça en apercevant un gros volet épais cacher la vue. Il voulu alors discuter un peu avec Nala, mais surpris cette dernière les yeux fermés, en train de fixer le mur d’un air perdu.

- « Ca va aller ? » Lui demanda-t-il. Elle approuva d’un simple hochement de tête, ce qui confirma dans la tête du garçon qu’elle était profondément anxieuse. Il tourna la tête et vit Matthéo dans la même situation qu’elle.

- « Eh, faut pas désespérer… »

Le blondinet tourna un visage inquiet vers son ami, avant de murmurer.

- « Il y a quelque chose qui ne va pas…

-  De quoi ? »

Il ouvrit à nouveau la bouche pour s’expliquer, lorsque la porte de la grange s’ouvrit soudainement. Les quatre personnes se levèrent d’un bond, mais furent toutes rassurées lorsque Richard leur assura qu’ils ne risquaient rien. Il portait un plateau contenant quatre soupes et quatre morceaux de pain. Un gobelet contenait du vin tandis que les trois autres étaient remplis d’eau.

- « Chouette, du vin ! » S’exclama Axel, guidé par son estomac.

- « Bas les pattes, petit homme. T’es trop jeune pour ça. » Intervint aussitôt son frère en le poussant. Richard leur sourit gentiment, avant de déclarer sur un ton confiant.

- « Bien, mieux vaut pour vous que vous dormiez ici. Vous ne risquez rien.

- C’est faux… »

Toutes les têtes se tournèrent vers Matthéo, qui regardait son oncle, terrifié. Il ajouta en bredouillant presque, le visage complètement livide.

- « Mon oncle… Pourquoi vous mentez… »

Richard s’approcha de son neveu, puis le fixa d’un regard sévère. Ce dernier trembla de tous ses membres puis baissa les yeux au sol. Enzo intervint alors.

- « Ne vous inquiétez pas, nous partirons dès demain à l’aube.

- Mais il ment… » Murmura à nouveau le blondinet, la voix étouffée. Il sentait son cœur oppressé par le très lourd regard de son oncle. Il avait l’impression qu’il n’allait pas tarder à tomber dans les pommes.

- « Matt’, à quoi tu joues ? » Fit Enzo.

- « Voyons Matthéo, je sais que tu es inquiet, mais tu n’as rien à craindre de la part des Firel. » Ajouta Richard.

Le jeune garçon ne répondit pas, trop intimidé et mal à l’aise. De la sueur ruisselait sur son front, et il ne souhaitait qu’une seule chose, que son tonton décroche son regard. Mais une autre voix vint le défendre.

- « Matt’ ne ment jamais, en revanche, il voit ceux qui mentent ! » S’écria Axel en s’interposant bravement entre l’oncle et le neveu. Ce dernier put à nouveau respirer calmement, sentant un lourd poids s’évaporer de son corps.

- « Axel ! »

Enzo commença fusilla son frère du regard, mais Nala intervint à son tour.

- « Si Matt’ dit que cet homme ment, je le crois aussi ! »

Elle se dirigea vers la porte de la grande et abaissa la poignée. Mais en vain, la porte était fermée à clé… Le jeune chevalier se tourna vers Richard, résigné. Il posa sa main sur la garde de son épée et ordonna d’une voix menaçante.

- « Donnez-nous la clé. »

Axel retrouva en son frère l’autorité et la bravoure de son père. Il se surprit à dégager de l’admiration, et ne put s’empêcher d’éprouver de la fierté d’être son frangin. Malheureusement, cette autorité ne suffit pas à arranger le problème, car le membre de la famille Eyen dégaina son arme pour la pointer sur le chevalier. Enzo dut donc dégainer la sienne en intimant aux trois jeunes de s’écarter. Les deux combattants se toisèrent un moment, puis le plus âgé fut le premier à attaquer. Il commença par une estoque horizontale de toutes ses forces dans l’espoir de désarmer son adversaire, mais ce dernier eut le réflexe de reculer. Axel savait que son frère avait toutes ses chances, car il possédait une agilité extra ordinaire, palmant à son manque de force. Le jeune homme s’abaissa puis posa une main au sol avant de lever soudainement son pied pour le loger dans le poignet armé de son adversaire. Ce dernier ne lâcha pas pour autant son arme et il la dirigea vers le sol. Enzo roula sur le coté et se releva d’un bond, puis il frotta sa lame contre celle de son ennemi pour l’écarter afin d’attraper brusquement la main de son adversaire. Une fois qu’il fut sûr de la tenir, il lâcha sa propre épée et attrapa le poignet de Richard avec ses deux mains pour le faire lâcher prise, tout en lui donnant un coup de genou dans le ventre. Ce dernier n’eut pas la souplesse nécessaire pour riposter. Il poussa un râle et ne put empêcher le chevalier de lui prendre l’épée des mains pour pointer la lame sous la gorge. L’homme vaincu leva un bras, et glissa l’autre sous sa veste marron pour en sortir la clé. Il la lança à Axel, qui se précipita sur la porte pour l’ouvrir. Une fois dehors, il s’assura qu’il n’y avait personne puis fit signe aux autres de le suivre. Enzo ordonna à tous le monde de sortir, sauf sa victime qu’il menaçait toujours de l’épée, puis demanda à Matthéo de refermer la porte afin qu’il s’entretienne avec son oncle un court instant. Une fois qu’ils furent seuls, le jeune chevalier planta ses yeux marrons dans les iris jaunes de son ennemi.

- « Je n’aurais jamais cru qu’un membre des Eyen allait nous trahir… Comment avez-vous pu faire cela à mon père ! »

Il appuya légèrement sa lame sur la gorge de l’homme et le força à reculer jusqu’à toucher le mur derrière. Une goutte de sang perla sur sa nuque, tandis que Richard regardait avec crainte son adversaire.

- « Noriak est un chevalier bien plus puissant que ton père… Si nous ne lui obéissons pas, il…

- BALIVERNES ! Noriak n’est pas un chevalier ! Il ne mérite pas ce statut ! » Tonna Enzo avant d’enfoncer la lame à quelques millimètres dans la gorge de l’homme gémissant.

- « Si j’avais été seul, je vous laisserais vivre. Car les soldats savent que je me rebellerais contre eux, pour mon père. Mais ils ne savent rien pour Axel et Nala, ni pour Matthéo. Je ne peux pas prendre le risque qu’ils sachent qu’ils sont avec moi. Je ne peux pas mettre leur vie en danger.

- Attendez ! Je ne dirais rien, je vous le promets ! » Supplia Richard en posant une main sur la lame. Ses bras tremblaient, et il était terrifié à l’idée de mourir maintenant, par la lame d’un Skyan. Enzo le regarda avec indifférence. Il pensa au danger que courraient les trois jeunes s’il ne faisait rien. Puis Richard reçut son funeste sort. Enzo jeta l’épée ensanglanté, reprit la sienne, puis sortit en refermant la porte derrière lui. Il lança un air sombre à Matthéo.

- « Ton oncle ne nous poursuivra pas. »

Ils se mirent ensuite en route dans la nuit déjà présente, vers un petit chemin qui conduisait à des heures de marche vers le port de Clon’sil. Cet endroit était plus au nord de leur village, et il n’était pas dit qu’ils ne rencontrent pas du danger en y allant. Matthéo fermait la marche, jetant de fréquents regards derrière lui. Il ressentait une honte immense pour deux raisons. La première est qu’il venait de trahir un membre de sa famille, la deuxième étant qu’un membre de sa famille venait de trahir celle de ses deux meilleurs amis. Il ne savait pas s’il avait bien fait d’agir ainsi. Tout ce qu’il avait voulu, c’était protéger Axel et Nala. Mais il espérait sincèrement que tous les Eyen n’étaient pas comme son oncle. Pourvu que ses parents resteraient fidèles et loyaux envers la chevalerie. Nala marchait devant lui, sa sacoche ouverte car elle serrait dans ses bras son gros œuf. À coté, Axel tentait de la convaincre de ranger cet objet pour qu’elle s’occupe un peu de lui. Il utilisait des arguments stupides qui faisaient rire la demoiselle. Et voyant qu’elle riait, il continuait à fanfaronner auprès d’elle jusqu’à ce que son frère lui intime de se taire, désespéré. Enzo ouvrait la marche, la main sur le fourreau de son épée. Il affichait un air soucieux et méfiant. Son bras tremblait un peu, et son petit frère s’en aperçut. Enzo le cacha donc aussitôt en le plaquant contre lui, mais c’était trop tard. Axel lâcha Nala pour s’approcher de son frangin et murmurer.

- « Papa m’a appris que lorsque le bras d’un homme tremblait autant pour une raison autre que la peur, c’est que ce bras venait de faire quelque chose de… pas très bien. »

 Enzo ne répondit pas, affichant une mine sérieuse. Il continuait de marcher en espérant ne pas croiser de danger sur la route. Mais l’adolescent insista.

- « Qu’est-ce que t’as fait à l’oncle de Matt’ ? »

Le chevalier tourna la tête vers son frère et plongea son regard dans le sien. Ils avaient les mêmes yeux, les mêmes expressions. Pourtant, il avait l’impression de trouver quelque chose dans le regard d’Axel qu’il ne sentirait jamais plus chez lui : L’innocence.

- « Je l’ai tué.

- Je m’en doutais. » Répondit simplement le garçon. À ce moment, toute l’innocence qu’Enzo croyait voir en lui s’évapora. Il regarda son petit frère d’un air stupéfait, et chuchota en veillant à ce que personne d’autre que son interlocuteur ne l’entende.

- « J’ai tué un homme, Axel. Et c’est tout l’effet que ça te fait ?

- Tu l’as dit toi-même que nous étions en danger, et tu es un chevalier. Papa aussi a tué. Et puis ce ne sera pas le premier que tu t… Oh BON SANG t’as fait quoi ??!

- Chhhht ! »

Enzo plaqua une main sur la bouche de son frère pour qu’il se taise. Il adressa un sourire gêné à Matthéo et Nala, avant d’accélérer le pas pour emmener Axel à l’écart. Ce dernier dégagea la main de sa bouche et observa interloqué le chevalier. Son frère… Son propre frère venait de tuer un homme ! Et juste à coté d’eux en plus !

- « Si je ne l’avais pas fait, vous auriez été en danger ! C’est la fatigue qui te rend aussi long à la détente ? Tu m’as fait peur un instant ! »

Les yeux écarquillés, Axel n’en revenait pas. Son frère venait de tuer un homme pour la première fois, pour les protéger, eux. Il se rendit d’autant plus compte de la gravité de la situation, et s’éloigna légèrement d’Enzo pour se poster auprès de Nala. Là, il passa un bras autour des épaules de cette dernière et la serra contre lui, sans lui laisser le soin de comprendre ce qu’il lui arrivait.

Cette nuit risquait d’être bien mauvaise pour Enzo, dont le bras tremblait toujours après avoir ôté la vie d’un être.

9 mai 2009

La forêt de Sylivia

Un magnifique coucher de soleil s’offrait par-dessus la colline surplombant le village. Ce soir là, il était orangé, baignant dans une paisible atmosphère de sérénité. Des tâches floues apparaissaient autour lorsqu’on le fixait trop longtemps. C’était ce que remarquaient les trois jeunes gens qui l’admiraient, assis sur une haute branche d’un grand arbre.

_ « Allez encore dix secondes ! Neuf… huit… sept… six… Ahah t’as perdu ! À moi ! »

Matthéo poussa gentiment Axel pour prendre sa place. Il se leva ensuite et fixa bravement le soleil tandis que son ami se frottait les yeux en évitant soigneusement de toucher ses blessures.

_ « Ouais… mais c’est parce que j’ai déjà mal aussi ! » Se défendit-il en clignant plusieurs fois des paupières.

_ « Tu perds à chaque fois, mauvais joueur. » Rétorqua le blondinet qui ne détournait pas le regard, ni ne clignait des yeux.

Nala les regardait, refusant de se prêter à ce jeu en le trouvant débile. Elle aimait observer le coucher de soleil, mais préférait le savourer en y jetant plusieurs coups d’œil plutôt que de le fixer le plus longtemps possible pour savoir si elle était capable de tenir aussi longtemps que Matthéo. Mais ce dernier possédait des yeux extraordinairement résistants, et perçants, d’après Axel qui cherchait toujours des arguments à ses défaites.

_ « Bon, on va à la cabane ? » Fit-il en se levant à son tour pour se préparer à descendre.

_ « Attend j’ai pas fini moi ! » Protesta son ami.

_ « Nan mais c’est bon t’as gagné ! » Grogna l’adolescent en utilisant la corde qu’ils avaient accrochés en haut de l’arbre pour redescendre en sautillant, les pieds devant, pour faire le fier comme il savait si bien le faire.

_ « Nala saute ! Je te rattrape ! » S’exclama t-il une fois en bas.

La demoiselle poussa un petit rire et prit à son tour la liane pour arriver au sol par ses propres moyens, ignorant royalement et volontairement les bras tendus de son ami. Le troisième compagnon les rejoignit aussitôt en se frottant les yeux un peu endoloris par la lumière du soleil. Ensemble ils se mirent à marcher dans une grande forêt, prenant une direction autre que celle qu’offrait le chemin principal.

_ « Arrête d’y toucher. » Fit Nala en attrapant la main d’Axel pour que ce dernier cesse de tripoter son bandage au dessus de l’œil.

_ « J’y peux rien… Ca me pique. »

_ « L’infirmière a dit que ta peau avait été brûlée. » Déclara Matthéo en regardant le futur chevalier.

Ce dernier haussa les épaules et répliqua sur un ton grincheux.

_ « Pff, n’empêche que la prochaine fois je lui fous sa raclée ! »

_ « Utiliser son pouvoir… C’était odieux. » Lâcha la jeune fille en regardant droit devant elle.

 

Elle en voulait à cette bande, surtout à Clothilde et Edmond, mais elle les enviait en quelque sorte aussi, car ils possédaient un don utile et contrôlable. Ces deux là étaient en vérité cousins, venant du clan des Firel, famille redoutée dans tous le pays. Riches,  ils étaient méchants et mauvais, n’hésitant pas à se moquer ou à frapper les personnes plus faibles pour ce qu’ils appellent le divertissement. La famille des Skyan et des Eyen, qui étaient très proches l’un de l’autre, détestaient les Firel. La particularité héréditaire de ces bourgeois résidait dans la chaleur.

Chacun des membres possédait un don en rapport avec la chaleur. Et Edmond, qui n’hésitait pas à se vanter de ce pouvoir, pouvait faire chauffer durement ses mains pour brûler celui qu’il touchait avec.

 

Les morceaux de bois annonçant l’entrée de leur cabane apparut, puis le petit toit que les trois amis s’étaient fabriqués il y a des années de cela, les accueilli avec toujours autant de chaleur à chaque fois qu’ils venaient ici. C’était leur QG, leur coin préféré et ils s’y réunissaient chaque soir où chaque journées où ils n’allaient pas à l’école, pour jouer, parler, travailler parfois… Souvent ils ramenaient des gâteaux et de la boisson pour se servir de la petite table qu’ils avaient construit, mais ce soir là ils n’allaient pas rester longtemps à cause de la punition d’Axel pour le lendemain. Nala lui avait proposé son aide, mais le garçon avait refusé en prétextant qu’il ne devait pas refiler son travail à une fille, avant d’éclater bêtement de rire pour ensuite s’en mordre les doigts en comptant le nombre de page du règlement des chevaliers. Ce règlement est un ensemble de lois indiquant à chaque être qui souhaite devenir chevalier, la manière de se comporter. Ce qu’il faut faire et ne pas faire. Par exemple il faut se montrer galant, il faut être loyal, courageux, déterminé… Tous cela définis par une cinquantaine d’articles servant plus de punitions aux élèves pas sages que de modèles aux nouvelles recrues.

_ « J’ai pas chaud moi. » Se plaignit la demoiselle une fois à l’intérieur. Elle frotta ses mains et souffla dessus pour accompagner le geste à ses paroles. Son regard se posa ensuite alternativement sur Axel et Matthéo, attendant une réaction habituelle lorsqu’elle disait ça.

_ « Me regarde pas comme ça, c’est à lui d’aller chercher du bois ! »  Fit le blondinet en levant les mains.

_ « Hein ? S’écria son ami, la dernière fois c’est moi qui y suit allé ! »

_ « Peut-être, mais tu m’as promis que tu le ferais trois fois d’affilé si en échange je te faisais ton devoir d’Homyatien. » Répondit calmement Matthéo, en regardant le garçon d’un air supérieur. Ce dernier fourra les mains dans ses poches et sortit de la cabane d’un air renfrogné. Il s’éloigna en donnant un coup de pied dans un caillou, puis disparut du regard des deux autres.

_ « On aurait du passer à la boulangerie pour acheter des pâtisseries. » Déclara l’adolescent en se tournant vers la jeune fille.

_ «  En quel honneur ? » Demanda celle-ci en s’asseyant et en regardant la petite cheminée qu’ils avaient confectionnés ensemble, et qu’ils allumaient presque tous les soirs pour profiter de la chaleur d’un bon feu.

_ « En l’honneur de cette magnifique gifle qui a remis la peste à sa place ! Ca va rester gravé dans nos mémoires ça ! »

Nala afficha un grand sourire à son ami. À vrai dire elle se sentait fière d’avoir eu le courage de faire ça, même si elle se doutait que la vengeance ne sera pas de tout repos. Mais peu importe, elle était avec Matthéo et Axel, elle ne risquait rien.

_ « En plus, ça fait du bien. » Ajouta la demoiselle en fixant le sol, le regard perdu dans le vide. Son sourire s’était effacé, laissant place à un visage plus mélancolique.

_ « C’est sûr que ça a du te soulager, j’aurais aimé être à ta place, ou à celle d’Axel lorsqu’il a essayé de castrer Edmond ! Mais j’ai moins de courage que vous moi… Nala ? »

La jeune fille ne bougeait plus, les yeux complètement pétrifiés sur ce sol marron.

_ « Mal à la tête… » Lâcha t-elle d’une voix faible mais indifférente.

Matthéo lança un regard inquiet à l’entrée de la cabane. Il y marcha doucement puis observa avec crainte le comportement de la demoiselle, qui avait posé une main sur ses deux yeux fermés.

 Elle avait légèrement baissé la tête, puis la releva pour la tourner vers son ami. Le fixant d’un très étrange regard, il put apercevoir des iris… noires.

_ « AXEL !!! »  Hurla le garçon avant de reculer en voyant Nala sauter vivement de sa chaise pour se mettre à courir vers lui. Il sortit de la cabane et s’arrêta net en apercevant dehors Edmond qui les avait suivi, une torche à la main. Il s’apprêtait à enflammer leur cabane.

_ « Nala arrête ! » Cria Matthéo en regardant la jeune fille le dépasser pour foncer comme une furie sur le troisième. Elle semblait comme possédée, et sans même laisser le temps à son adversaire de comprendre pourquoi une fille lui sautait dessus, elle le poussa violemment en arrière d’une telle force qu’il tomba sur les fesses. Se jetant dessus, elle plaqua ses mains sur la gorge de sa victime et serra…

_ « Cerban…. TUER ! » Cracha t-elle tandis que la peau de son visage se noircissait autour de ses yeux. Bloquant les cordes vocales ainsi que la respiration d’Edmond, ce dernier laissait échapper des râles, les yeux effrayés par le visage terrifiant de la demoiselle. Elle possédait une force incroyable, il n’arrivait pas à la dégager.

La jeune fille serrait de plus en plus fort, lorsqu’un violent coup d’épaule la projeta au sol en la faisant lâcher prise. Le troisième en profita pour se relever et fuir.

_ « Rattrape le ! » Cria Axel à Matthéo tandis qu’il jetait le morceau de bois avec lequel il avait frappé son amie.

Pendant que le blondinet s’était mis à la poursuite d’Edmond, le jeune brun avait sauté sur la jeune fille et l’avait presque écrasé de son poids avant de la serrer brusquement contre lui.

_ « Ca va aller… je suis là… » Murmura t-il, allongé sur le sol, ses bras tenant les épaules de la demoiselle qui se débattait de moins en moins, ses jambes enroulées autour des siennes. Son visage était collé dans son cou, il lui soufflait des mots réconfortants, des paroles douces. Sentant la présence de son ami, elle se calma aussitôt. Ses yeux se fermèrent, et des larmes apparurent aux coins de ses paupières.

_ « Axel… » Souffla t-elle, sa tête se posant doucement sur le sol froid, sa peau redevenant blanches, ses yeux reprenant leur jolie couleur émeraude.

_ « Là… C’est fini… Tout va bien… »

Il se redressa, l’aidant à faire de même. Voyant que tous les membres de la demoiselle tremblaient, il la rapprocha et la blotti contre lui pour lui caresser les cheveux afin de la réconforter.

_ « Pardon… je ne voulais pas… »

_ « Chht… tu n’y es pour rien… »

Il resta à ses cotés, dans cette position, jusqu’à ce que Nala ait la force de se relever, et reprenne petit à petit ses esprits. Ce n’était pas la première fois qu’une crise de ce genre arrivait. Personne n’était au courant, sauf Axel et Matthéo, qui savaient quoi faire dans cette situation. Etrangement, quand ça arrivait, Axel n’était pas là. Et lorsqu’il apparaissait, lorsque Nala sentait sa présence, elle reprenait le contrôle de son corps en chassant la personnalité qui l’avait envahie. Seul lui en était capable, c’est pourquoi il avait interdit à ses deux amis d’en parler à qui que ce soit, pas même à ses parents. Il fallait que personne ne sache, surtout qu’on ne pouvait prévoir les réactions de son père, qui avait perdu sa petite fille à cause d’un cas de schizophrénie, et qui pensait que Nala aurait peut-être la chance de vivre ‘saine’.

 

Il courait relativement vite grâce à ses grandes jambes, mais le jeune homme était plus grand que lui… Matthéo le voyait toujours, il lui hurlait d’arrêter, qu’il allait tout expliquer, que ce n’était pas ce qu’il croyait… Lorsqu’il déclara que Nala ne les avais pas suivit, Edmond s’était brusquement stoppé.

_ « Edmond… attend… » Fit l’adolescent à bout de souffle. Edmond le regarda avec haine, massant sa gorge. Il toussa puis s’exprima de sa gorge raillée.

_ « Elle est complètement folle ! Elle a voulu me tuer ! Ca ne se passera pas comme ça bande d’idiots ! »

_ « Attend ! »

Matthéo attrapa le bras de celui qui venait de se retourner, mais un brusque coup de poings dans le ventre le plia en deux, le souffle coupé.

_ « Ne me touche pas ! » S’exclama le gaillard.

_ « Je… Ne le dis à personne je t’en prie ! » Supplia le jeune garçon en se redressant.

_ « Il faut avertir tout le monde ! Vous êtes complètement dangereux de laisser une folle en liberté ! Il faut l’interner ! »

Edmond donna un autre coup de poing au même endroit, mais plus fort que le précédent. Matthéo tomba à genoux en poussant un cri de douleur, et ne put réagir lorsqu’il vit le troisième prendre la fuite en regardant nerveusement derrière lui.

 

Le temps s’annonçait dur, il risquait d’y avoir de gros nuages ce soir… L’adolescent se leva en soufflant, puis fit demi tour en se mordant la lèvre. Une main sur son ventre, il marcha lentement pour apercevoir les deux silhouettes enlacées de ses amis. Axel lui fit signe d’approcher, que tout allait bien. Nala était en pleurs, le front collé au torse de son protecteur.

_ « Je suis désolé… » Répétait-elle sans cesse en tremblant de moins en moins fort.

Le blondinet posa une main sur son épaule pour essayer de la réconforter. Il leva ensuite le regard vers la tête d’Axel, puis afficha une mine désespérée pour lui avouer que les ennuis commençaient.

_ « J’ai pas réussi à l’arrêter… Il va prévenir tout le monde. »

Les pleurs de la demoiselle redoublèrent tandis que l’étreinte de son compagnon se faisait plus forte. Ce dernier était en pleine réflexion, le regard perdu dans le vide. Il finit par lâcher, sur un ton décidé.

_ « On ne rentrera pas chez nous. »

_ « Quoi ?! » S’écria son ami. Nala venait aussi de lever la tête vers lui pour l’interroger du regard.

_ « Je veux pas qu’on nous sépare, je préfère encore fuir. » Ajouta le garçon avec fermeté.

Matthéo voulu répliquer, le ramener à la raison, mais il se résigna en voyant le regard déterminé qu’affichait son meilleur ami. Il baissa alors la tête puis murmura.

_ « Je pense pas que Satlan va l’abandonner ou lui faire du mal. Il la considère comme sa fille maintenant non ? »

Axel ne répondit pas. Il est vrai que son père les a élevé tous les deux avec autant d’égalités. Sans injustice, avec le même regard, la même tendresse mais aussi la même fermeté pour la même éducation. Julia et lui avaient éduqué Nala comme leur propre fille, ils ne pourront pas lui faire de mal. Seulement il y avait les autres personnes, notamment ceux du clan des Firel, qui exigeront qu’elle soit internée ou pire, exécutée. Et Satlan est un digne chevalier qui, face à l’autorité, ne pourra pas résister. Et puis il risque d’être troublé en apprenant que Nala n’a pas échappé aux gênes héréditaires de la famille Follow.

_ « Merci… » Chuchota la jeune fille en fermant les yeux. Elle reçut pour réponse un baiser dans ses cheveux, puis à nouveau des paroles réconfortantes venant de ses deux amis. Elle aurait tout donné pour être une fille normale, pour que ces deux êtres qui lui étaient si chers, ne soient pas dans un si mauvais pétrin… Elle aurait tout donné pour ne jamais être entrée dans leur vie, et ne jamais leur avoir causé d’ennuis.

9 mai 2009

Dix ans plus tard.

Des bruits de pas précipités dans l’escalier de bois grinçant, un jeune garçon sauta à la troisième marche de la fin pour atterrir avec souplesse sur le sol. La voix de son père retentit alors.

_ « Axel dépêche toi, vous allez être en retard ! »

_ « Oui oui ! » Répondit le jeune en soupirant presque.

Il enfila à la va vite des bottes marrons et se leva en mettant son sac sur le dos.

_ « J’suis prêt ! »

_ « À ce soir ! » Fit la voix de Julia depuis la cuisine.

Les deux adolescents sortirent de la chaumière puis se mirent à courir pour ne pas rater la cloche du collège. Ils étaient réellement en retard en fait…

_ « C’est rare que tu sois aussi pressé, tu as cours d’escrime ? » Demanda Nala entre deux inspirations pour reprendre son souffle.

_ « Ouais. » Répliqua le garçon en accélérant l’allure pour garder les devants sur son amie.

C’était tout lui ça, il fallait toujours qu’il soit supérieur sous prétexte qu’il était un garçon ! Cela ne dérangeait pas la demoiselle, qui le trouvait plutôt ridicule dans ces moments d’ailleurs.

Axel était plutôt grand pour son age. Il avait une carrure de futur chevalier, le métier qu’il voulait faire plus tard. Depuis tout petit, son père lui apprenait différentes parades et techniques pour qu’il soit et reste le premier de sa classe en escrime. Inutile de préciser que le garçon en était plus que fier, et qu’il n’hésitait pas à montrer aux autres son expériences durant les cours. Il avait des cheveux mi-longs, bruns foncés avec beaucoup de mèches rebelles qui partaient dans tous les sens, y comprit sur le devant de son visage. De grands yeux noisette bougeaient dans tous les sens, aussi vif que ceux d’un oiseau. Il possédait également un visage toujours confiant, franc, lisse, jeune, et facile aux sourires.

_ « T’as quoi toi ? » Demanda t-il en tournant la tête vers son amie.

Nala avait une longue chevelure chatoyante et ondulée, possédant des reflets luisants sur sa belle couleur rousse. Ils semblaient toujours propres mais sauvages. Sa plus grande fierté résidait dans ses profonds et magnifiques iris émeraude, qui avaient la particularité de trahir la plupart de ses émotions et expressions à travers sa peau blanche et lisse. Ses fines lèvres étaient souvent entrouvertes pour laisser découvrir une partie de ses dents blanches. Elle était plutôt petite, mince et fragile et son charme timide plaisait aux regards extérieurs.

_ « Histoire, c’est le seul jour où ma place est proche de celle de la garce. » Répondit-elle en ralentissant l’allure devant l’apparition d’une grande bâtisse. Personne dans la cours, les élèves devaient êtres déjà tous rentrés. À gauche, des bruits et des cris de garçons se faisaient entendre.

_ « Si elle t’embête encore… dis le moi. » Fis Axel en se dirigeant vers les silhouettes actives du cours d’escrime déjà commencé.

_ « À ce midi. » Lâcha Nala en prenant la direction opposée vers la porte d’entrée.  

Elle traversa le couloir d’une marche rapide, puis s’arrêta devant une salle fermée où résonnait la voix d’un professeur. Elle remit ses cheveux en place, s’éclaircit la voix, puis toqua.

_ « Entrez. » Fit la voix.

La demoiselle abaissa la poignée puis rentra dans la pièce sous les regards de ses camarades. Elle détestait être regardée ainsi… D’autant plus qu’elle entendit des rires provenant de quelques personnes.

_ « Bonjour, pardon d’être en retard. »  Risqua t-elle en levant les yeux vers l’adulte. Ce dernier lui ordonna d’un simple geste d’aller s’asseoir puis reprit ses explications. La seule place qui restait de libre se trouvait près de la fenêtre, chouette ! Mais l’enthousiasme de Nala s’estompa lorsqu’elle remarqua la garce assise juste derrière. Elle lui adressait un grand sourire mesquin, heureuse de retrouver une de ses souffres douleur.

_ « Et alors, on ne dit plus bonjour ? » Murmura t-elle en regardant Nala s’asseoir.

_ « Bonjour Clothilde… » Répondit cette dernière sans lui adresser un regard. Des rires discrets fusèrent dans son dos, et la peste se moquait déjà d’elle avec sa bande ! Enfin là ce n’était pas trop ennuyant, mais ça le devenait plus lorsque la bande était au complet, avec les gros baraqués qui suivaient Clothilde comme des petits chiens. Surtout Edmond, son ‘bras droit’.  C’était un grand sans cervelle, qui avait redoublé déjà deux fois pour finalement arriver en troisième. Axel et Nala quant à eux étaient en cinquième. Le dos contre la fenêtre pour avoir à l’œil les écrits du tableau et les agissements de son ennemie, notre demoiselle écrivit les notes à prendre… La raison pour laquelle les deux adolescents étaient devenu des cibles de la bande de Clothilde, c’est parce qu’ils avaient volé au secours de leur souffre douleur favori en sixième, Matthéo. Ce dernier était devenu leur meilleur ami, et ils subissaient à trois les blagues idiotes de gamins idiots. Espérons que du coté des garçons ça se passe mieux…

_ « En trois coups ! »

_ « T’es pas un peu vaniteux là ? »

_ « On parie ? »

Axel arborait un sourire fier et un air défieur. Son épée d’exercice brandie devant lui, il attendait que son ami accepte. Lorsque ce dernier poussa un soupir de résignation, le garçon lui bondit dessus avant de lui asséner un coup sur la jambe droite, puis de remonter aussitôt aux côtes gauches, et enfin il le poussa en arrière en donnant un coup de manche sur la trempe de sa victime. Matthéo tomba au sol en poussant un cri de douleur.

_ « Il faut désarmer l’adversaire, pas le faire tomber ! » Retentit la voix de leur entraîneur.
Axel laissa échapper un ‘ah’ et donna un coup de pied dans l’arme de son ami pour la faire voler quelques mètres plus loin.

_ « Tu vois ? » Fit-il d’un air triomphant, en s’abaissant pour aider Matthéo à se relever.

_ « C’est toujours la même chose avec toi, pourquoi tu te déchaîne tout le temps sur moi ? » Demanda ce dernier sur le ton de la plainte.

D’un revers de la main il dégagea ses longs cheveux blonds qui lui tombaient sur le visage, puis réajusta sa veste. Il était moins grand et plus fin qu’Axel, et ses muscles étaient peu visibles. De nature plus discrète, il possédait de magnifiques yeux bleus. Mais cette particularité provenait de sa famille, le clan Eyen.

_ « Parce que y’a que moi qu’ai le droit de te battre ! »  Répliqua le futur chevalier en se remettant en garde.

_ « Alors les petits, on joue aux petits soldats ? »

Reconnaissant la voix enraillée, Axel fit volte face pour dévisager Edmond. Les cinquième B et troisième C prenaient leurs cours d’escrime en même temps, et il n’était pas difficile d’échapper à la surveillance de l’enseignant dans le brouhaha et le désordre des activités.

 

_ « Pousse toi Edmond, tu nous fais de l’ombre ! » Lança Axel en toisant celui qui avait atteint ses dix-huit ans il y a peu. Ce dernier lâcha un ‘vous avez vu ça’ à ses ‘potes’ et éclata de rire en même temps qu’eux. Il leva ensuite son arme et s’écria fièrement.

_ « Viens te battre si t’es un homme ! »

L’adolescent s’avança inconsciemment vers le grand, prêt à accepter mais Matthéo l’arrêta.

_ « Ca va pas ?! Il va te broyer ! »

Des rires fusèrent à nouveau, et Edmond regarda les deux amis avec mépris.

_ « Mauviettes. » leur lança t-il avant de se tourner pour retourner à son cours. Il allait partir en se moquant, lorsqu’un caillou le toucha à l’épaule. Se retournant, il aperçut Axel qui lui en lançait un autre tout en repoussant Matthéo qui essayait de l’en empêcher.

_ « J’suis pas une mauviette ! »  Fit l’adolescent en se mettant en position de combat après que le troisième ait évité la deuxième pierre.

Edmond laissa un ‘pfeuh’ s’échapper. Il mit son épée devant lui et l’autre main dans son dos.

_ « D’une main je te massacre, minus ! »

_ « Axel arrête ! »

_ « Matt, écarte toi… »

Le cinquième attaqua le premier, courant pour prendre de l’élan. Voulant faire une estafilade sur les jambes de son adversaire, il vit son attaque parée par l’arme de ce dernier, et se prit le genoux d’Edmond dans la figure. Reculant sous le choc, il sentit du sang s’écouler de son nez. L’adolescent réattaqua l’ennemi au sourire insolent, puis il tenta de le ruer de coups. Toutes ses attaques étaient parées, et le garçon dut se baisser pour éviter de justesse le bois qui passait à l’horizontal au dessus de sa tête. Il se redressa aussitôt et tenta une attaque en diagonale, du bas vers le haut. Edmond la para sans problème, mais il ne vit pas venir le pied d’Axel qui se logea… Où il ne fallait pas.

_ « Arrg… » Gémit-il en se pliant en deux, lâchant son arme sous la douleur.

Voyant que son adversaire n’avait plus d’arme, Axel lâcha la sienne pour garder un combat d’égal à égal. Il lui sauta ensuite dessus mais le troisième se laissa tomber en arrière pour plaquer le cinquième au sol. Le visage rouge et le regard fou de rage, il donna de violents coups de poings dans le visage de l’adolescent, sous les encouragements des autres garçons…

_ « Arrêtez ! Arrêtez ça tout de suite ! » Rugit la voix du professeur que Matthéo avait prévenu. L’homme sépara les deux assaillants avant de leur crier dessus.

_ « Vous viendrez nettoyer la cours demain soir ! Et vous me copierez le règlement des chevaliers en entier pour demain ! » Tonna l’enseignant avant de renvoyer le troisième à son collègue. Edmond lança un regard haineux et dédaigneux à Axel, avant de repartir en marchant comme un canard… Mais gare à celui qui oserait se moquer ! Axel quant à lui tourna la tête pour cracher du sang au sol. Il sentait une affreuse douleur au nez et avait mal à la mâchoire.

_ « Matthéo, emmenez le à l’infirmerie. » ordonna l’adulte avant de reprendre les cours en faisant signe aux spectateurs de se remettre au travail.

Matthéo aida son ami à se relever, puis il passa sa main autour de son épaule pour prendre la direction d’un bâtiment proche.

_ « Aie… Est-ce que j’ai quelque chose à l’œil ? » Demanda Axel en enlevant la main qu’il avait gardé plaquée sur son œil jusqu’à présent.

_ « Un gros cocard ouais. » Répondit l’autre sur un ton un peu sec.

_ « J’allais quand même pas le laisser nous insulter ! » Se défendit l’adolescent en sentant que son ami lui en voulait.  

Ce dernier ne répondit pas, mais il n’en pensait pas moins.

_ « Il te suffisait juste d’ignorer ses provocations, on s’en fiche de ce mec… »

_ « Ben pas moi. Je vois pas pourquoi je devrais le laisser t’humilier, nous humilier. Ca fait mal… »

Soupirant devant l’esprit borné de son compagnons, Matthéo préféra se taire et frappa à la porte contenant l’écriteau ‘bureau des soins’.

La cloche annonçant la fin des cours sonna enfin. Midi, Nala allait retrouver Axel et Matthéo dans la zone verte de la cours, puis ils iraient manger ensemble à la cantine de l’établissement. Elle sorti la première pour tenter de semer la peste, puis marcha à vive allure pour sortir des couloirs. Une fois dehors, elle s’avança vers les deux silhouettes familières, Matthéo lui faisait de grands signes.

_ « Salut Matt ! Comment tu… Axel ! » S’exclama t-elle en s’apercevant de l’état de son ami.

_ « Ben quoi ? » Répliqua naturellement ce dernier.

Il avait un pansement sur le nez, un bandage sur son sourcil droit et un énorme œil au beurre noir. Avant qu’elle ne demande quoique ce soit, le jeune blond expliqua.

_ « Il s’est battu contre Edmond tout à l’heure. »

_ « Je lui ai mis une sacré raclée quand même ! » Ajouta Axel sur un ton fier. 

Il lança ensuite un regard faussement à son ami lorsque ce dernier laissa échapper un ‘tu parle’.

_ « Satlan ne va pas être content, Julia non plus. » Déclara l’adolescente en faisant une moue désespérée avant de soupirer.

_ « Vous devriez plutôt aller vous cacher après l’humiliation que vous venez de vous prendre ! » Retentit une voix féminine derrière.

Clothilde les regardait, les mains sur les hanches. À coté se trouvait Edmond, qui évitait de marcher pour paraître ridicule, puis la bande des cinq autres garçons derrière qui ricanaient bêtement.

_ « Ca vous dirait pas de nous lâcher un peu ! » Cria presque Axel qui sentait à nouveau la colère le gagner.

_ « Oh je crois qu’on l’a vexé ! » Lâcha Clothilde en provoquant par cette phrase l’hilarité générale dans sa bande.

Axel marcha brusquement vers elle et s’arrêta juste devant en hésitant.

_ « Tu vas pas frapper une fille ? » Lança t-elle sur un ton provocateur au garçon un peu penaud devant cette réplique.

_ « Moi je peux. » Déclara Nala d’un ton calme. Cette dernière s’était vivement avancée vers la peste et, d’un geste souple, l’avait sèchement giflé. Un long silence s’ensuivit, où tous regardaient d’un air ahuris Nala et Clothilde. Celle-ci gardant la bouche ouverte sans comprendre ce qui lui arrivait.

_ « Allez on y va. » Ordonna Nala en prenant la direction de la cantine, suivie par Axel et Matthéo qui n’en revenaient toujours pas.

_ « Ouah ça c’était beau ! » S’exclama le blond en regardant derrière lui pour observer leur pire ennemie crier sur ses sbires. Axel pouffa de rire mais s’arrêta aussitôt en sentant ses blessures douloureuses. Il posa son regard sur la fille du groupe, observa un instant son visage sérieux, puis passa une main sur ses épaules, fier d’elle.

9 mai 2009

Sous un ciel noir.

C’était un de ces temps qui obligeait mêmes les plus inconscients à rester chez eux. Des rafales qui emportaient tuiles, branches, déchets et autres projectiles dangereux dans les airs. Sous une couette mœlleuse, sous un toit protecteur, derrière une vitre brouillée par la pluie, devant une table surmontée d’un jeux de société, en attendant que la tempête passe… Les habitants étaient inquiets. Non, bien sûr, ils n’avaient pas peur pour leur vie. Ils avaient confiance en cette météo, mais le doute les rongeait, que pouvait-il se passer du coté des déclencheurs ? Il s’agissait là de Satlan, c’était sûr. Seul lui était capable d’autant de dégâts, mais il était d’ordinaire sage, calme, posé… Son caractère coïncidait mal avec son don, justement pour offrir à ces gens un soleil radieux en échange de leur sourire et surtout de leur permission d’habiter dans leur si belle ville. Il était maire, il était respecté, connu par tous, mais que voulait dire ce temps ?

Dans une des chaumières, un petit garçon était blotti contre sa mère, tressaillant à chaque coup de tonnerre.

_ « Maman… Quand est-ce que ça va s’arrêter ? »

_ « Bientôt mon chéri, bientôt… » Répondait-elle en levant un regard craintif vers la fenêtre noircie par la nuit.

Le silence pesait dans toutes les demeures, qu’elles soient petites ou grandes, remplies ou non, joyeuses ou pas. Tous les sourires avaient disparu, tout rire s’était évanoui, ayant fais place à une attente insoutenable.

 

Nous sommes à Sylivia, florissant village non loin de la cité de Klain, capitale du pays de Homyat.  Le Homyat est en vérité une immense île dont les rares explorateurs qui tentèrent de traverser l’océan pour savoir s’il y a d’autres terres, ne purent jamais revenir raconter ce qu’ils ont vu… Cet endroit est composé de familles ressemblant à des clans, gardant jalousement un secret pourtant connu de tous. Chaque famille possède une particularité, particularité qui offre un don à chaque membre. Ces dons sont souvent différents, mais toujours lié à la même base que le frère, la sœur, le père, la mère, l’oncle ou la tante. Certaines familles eurent de la chance car leur pouvoir héréditaire leur était bénéfique, d’autres n’y voyaient pas grande utilité. Etant bien plus aptes à étudier cet étrange phénomène qui différenciait les êtres, la technologie avança bien lentement dans ce monde. Pas de machine, sauf pour quelques jaloux égoïstes qui bénéficièrent d’un cerveau surdéveloppé comme héritage de leurs ancêtres. Cet univers est en quelque sorte médiéval, avec quelques armes à feu, mais les batailles se faisaient par arme blanche. Bataille, lorsqu’il y en avait bien sûr, car toutes sortes de lois, de règles établies pour le bien de tous empêchent les nombreux conflits qui pourraient déclencher une guerre de clan.  Qui dit guerre de clan, dit aussi alliés, alliés d’alliés, et donc guerre générale.

 

Revenons dans ce beau village ravagé par un temps destructeur. La cause se trouvait directement dans une maisonnette, où des cris d’homme et de femme ainsi que des pleurs d’enfant retentissaient.

_ « Pardon ! Pardon… pardonne moi… » Suppliait une mère, agenouillée devant un homme d’une trentaine d’année. Il avait dans sa main droite une épée ensanglantée, et la gauche tripotait nerveusement le col de sa chemise. Le visage ferme, les yeux embués de larme, il levait son arme et hésitait à l’abattre sur cette pauvre dame qui lui demandait pardon.

_ « Satlan… Arrête. » Murmura une autre voix féminine à coté de lui.

_ « Si je ne le fais pas… Elle risque de faire encore du mal. »  Répliqua t-il sur un ton sec, la gorge enrouée par le stress.

Il avait de sombres cheveux coupés courts, et le regard tout aussi noir. Tournant la tête vers son épouse, il reposa ensuite les yeux sur la pauvre femme, la jaugeant de toute sa carrure de chevalier. Finalement, il baissa sa lame de manière résignée.

_ « Merci…  merci… » Chuchotait la victime en pleurs. Elle tenait fermement la jambe du maire pour l’y embrasser. Celui-ci s’abaissa, il posa bravement sa main sur l’épaule de la mère.

_ « Ellena, relève toi. » Ordonna t-il sur on ton doux.

Elle s’exécuta aussitôt, ses mains attrapant le bras du guerrier pour y chercher réconfort. Dehors, le tonnerre s’éloignait petit à petit en même temps que le cœur du mercenaire se calmait. Ellena colla son front contre l’épaule de Satlan, elle ne pouvait stopper les larmes qui coulaient le long de ses joues. L’homme regarda un instant sa femme. Celle-ci semblait totalement désemparée. Elle tenait dans ses bras le corps inerte d’une petite fille d’à peine deux ans et demie…

_ « Nous n’aurions jamais du venir. Nous le savions ! »

Le poing du guerrier se serra. Il sentait sa vision devenir floue à cause des larmes salées. Préférant détourner le regard de sa défunte fille, il posa ses iris noirs sur le corps d’un autre homme, qui baignait dans une mare de sang. Il avait été l’époux d’Ellena, et Satlan n’avait eu d’autre choix que de le tuer…

_ « Ne la tue pas, il y a forcément une autre solution papa… » Fit un jeune garçon de douze ans, qui fixait son père avec les mêmes yeux, mais un air effrayé en plus. Il tremblait de tout son corps, sa main serrant fort celle de sa mère.

_ « Ellena, cesse de t’excuser, je sais bien que tu n’y es pour rien. » Lâcha le mercenaire, avec de la rancune dans la voix. Il ne devait pas en vouloir à cette femme, mais c’était pourtant la faute de son mari et d’elle s’il venait de perdre sa petite fille ce soir là… La veuve leva un regard rougi par ses pleurs. Elle lança au maire un air empli de gratitude pour la laisser vivre. Elle le lâcha doucement, décidant de partir, de sortir de leur vie et de les laisser à jamais, lorsque ses yeux bleus virèrent au rouge.

_ « Papa attention ! » Cria le petit Enzo en se blottissant contre sa mère.

Le guerrier poussa un cri de douleur en sentant la dentition de celle qu’il venait d’épargner le mordre plus que sauvagement à l’épaule. Il leva son arme, et la frappa avec. Après le premier coup qui visait à ce qu’elle le lâche, il s’avança d’un pas décidé et planta son épée dans le cœur de l’assaillante.

_ « Pardon Ellena… » Murmura t-il lorsque les iris de sa victime retrouvaient leur couleur naturelle. Elle s’agenouilla, crachant du sang par la bouche. La tête levée vers son agresseur, elle souffla.

_ « Ne la tue pas… ne… tue pas ma… fille… »

Elle se mit ensuite à tousser, puis s’écroula, morte. Sa fille ? Satlan l’avait complètement oublié ! Lorsqu’ils étaient arrivés, elle était pourtant là, même qu’elle était montée jouer avec… son deuxième fils !

_ « AXEL ! » Hurla l’homme en courant vers les marches pour les monter quatre par quatre. Sans même prendre le temps de savoir si elle était ouverte, il défonça complètement la porte d’une chambre fermée, puis se précipita dans la pièce en lançant des regards affolés partout. Pourvu qu’il ne lui soit rien arrivé…

Des pleurs attirèrent son attention dans un des coins les plus sombres. Un coup de tonnerre plus fort que les autres éclaira un court instant une couverture tremblante. Le mercenaire s’avança avec prudence vers la source du bruit.

 

 

 Il tendit la main, puis dégagea subitement la couette d’un revers de bras, provoquant un sursaut sur chacun des deux êtres qui se tenaient en dessous, serrés l’un contre l’autre, se tenant la main pour se réconforter. Une petite fille, et un petit garçon du même age, quatre ans. Ils regardaient tous les deux avec crainte le chevalier, retenant leur respiration en attendant de voir ce qui allait leur arriver.

_ « Axel ! » Bredouilla Satlan, soulagé de voir son enfant en vie. Il laissa son épée fracasser le sol en bois, puis tomba à genoux. Axel lâcha la main de son amie et se jeta dans les bras de son père pour se consoler. Sa mère ne tarda pas à se montrer, accompagnée d’Enzo.

_ « Oh Axel tu es là ! » S’exclama t-elle pour accueillir dans ses bras l’enfant qui venait de lâcher son père. Ce dernier resta agenouillé sur le sol. Il ramassa son épée et posa son regard sur l’autre personne silencieuse.

_ « Que vas-tu faire ? » Demanda son épouse.

Il ne répondit pas, se contentant de lancer un regard méfiant à cette petite fille, qui gardait les genoux collés à sa poitrine et qui observait les gens autour avec inquiétude.

_ « Je n’ai pas le choix… Elle aussi est maudite. » Fit le chevalier sur un ton nerveux et hésitant. Il leva doucement sa lame au dessus de la fillette, puis attendit. Une seconde, puis deux…

_ « Je… je peux pas… »  

Son épée tomba sur le sol dans un fracas assourdissant, effrayant davantage la petite qui plaqua ses mains sur ses oreilles. Elle répétait des « s’il vous plaît… » en regardant le sol, tête baissée. Axel se dégagea de l’étreinte de sa mère pour venir se placer entre son père et la fille.

_ « C’est ma seule copine. » Lâcha t-il sur un ton plaintif, le regard triste.

Satlan le regarda un instant, la bouche entrouverte. Il tenta de parler, mais aucun son ne sortit. Lâchant un long soupir, il prit son fils dans ses bras puis se releva. Ses iris noirs fixèrent la seule survivante.

 

La pauvre avait eu la malchance de tomber sur la seule famille qu’il ne fallait surtout pas… Tous étaient victimes de folie. Ils étaient en réalité des réceptacles, et entendaient des voix. Beaucoup d’entre eux avaient pour ‘don’ la schizophrénie, comme les parents de cet enfant. L’on nommait cette famille Le « Clan maudit » car ils finissaient tous à l’asile, ou dans leur tombe. Ils devenaient pour la plupart fou à cause de ces voix.

Pourtant la famille Skyan, celle de Satlan, s’entendait bien avec Jack et Ellena Follow. Ils étaient même amis, et ce soir devait être une simple soirée, avec de bons plats préparés par Ellena. Comme chaque soirée conviviales, les deux hommes parlaient combat, travail, tandis qu’Ellena et Julia s’expliquaient leur manière d’éduquer leurs enfants, de tisser, coudre, cuisiner... Seulement voilà. En plein repas, alors que les femmes criaient à table aux deux enfants manquant, Jack Follow avait baissé la tête. Il ne disait plus rien, suscitant intrigues et questions de la part des autres. Ellena ne mit pas longtemps à comprendre, et elle s’était levée en criant à ses invités de fuir. Mais c’était trop tard, car d’abord secoué de violents spasmes, l’hôte s’était emparé d’une arme et un rictus sadique s’était emparé de ses lèvres. Comme possédé, il avait brusquement poussé la table pour tout renverser sur le coté, puis s’était mit à courir dans la pièce. Passant à coté d’un berceau, il s’était arrêté, s’était penché, avait observé le bébé à l’intérieur, un sentiment de désir le rendant plus fou encore. Il avait levé sa lame, ignorant les cris des autres, puis avait transpercé sans aucune pitié le minuscule être qui rendit l’âme sans avoir eu l’honneur de découvrir la vie…

 

_ « Nala, c’est bien ça ? » Demanda le chevalier en toisant la fillette.

_ « Oui monsieur. » Répondit cette dernière entre deux reniflements.

L’homme se tourna, il se dirigea vers la sortie, intimant du regard à sa femme de s’écarter pour le laisser passer. Puis, avant de descendre les escaliers, il avait lâché.

_ « Viens. »

La petite se leva, sous le joug de son nouveau statut d’orpheline, elle suivit l’épée rouge…

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9 mai 2009

Nala & Axel

Vous allez entrer dans mon domaine. Il s'agit d'un roman fantastique, d'une époque médiévale remplie de chevaliers et de magie. Deux jeunes personnes du nom de Nala et d'Axel en seront les héros. Je vous demande de mettre des critiques constructives, ou bien de ne rien dire, et je vous en remercie.

Bonne lecture,

Toskiane.

ps : La lecture se fait de haut en bas.

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Nala & Axel
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